Las Vegas… Mais quelle ville extraordinaire ! Je n’avais jamais cru pouvoir me plaire dans une autre ville que Toulouse. Et pourtant, le royaume des jeux d’argent me fascine en tout points. Arrivé depuis seulement une semaine, j’ai déjà arpenté la plupart des rues, des clubs et des casinos… Mais sans la retrouver. Car bien sur, je n’ai pas quitté ma ville natale pour rien. Mon seul et unique but est de la revoir pour m’excuser pour la millième fois. Hermione Laurent… Mon ancienne meilleure amie, mais également mon tout premier amour. Clamant que je l’avais trahie, elle ne m’a plus adressé la parole depuis des années, brisant mon cœur au passage.
Et ta raison aussi, en passant…
Non, pas nécessairement. Cette voix dans ma tête m’énerve au plus au point.
Je suis toi, mon grand. Tu t’énerves toi-même, et tu as raison, pauvre imbécile.

« Non, tu n’es pas moi. Tu n’es qu’un parasite. »

Je me frappai l’arrière du crâne pour appuyer mes propos. Elle se tu, mais plusieurs personnes autour de moi se retournèrent. Arrêté au milieu de la rue, je parlais tout seul en me donnant régulièrement des gifles à l’arrière de la tête. Evidemment qu’ils me trouvent bizarre, ils ne l’entendent pas eux !
Les ignorant royalement, je repris ma route pour la discothèque. Après toute une après midi à tourner en rond dans ma chambre d’hôtel provisoire, j’avais grand besoin de m’aérer l’esprit. Et pour ça, quoi de mieux que de s’enfermer dans une boite à sardines avec la musique poussée à fond ? C’est surtout l’occasion de faire de nouvelles rencontres. Et pourquoi pas, ramener quelqu’un dans ladite chambre ? Car oui, je ne suis pas resté chaste durant les deux années où Hermy m’a ignoré. Jamais plus d’une nuit, évidemment, mais entre deux – trois observations d’Hermione, une groupie quelconque n’est pas de refus. L’argent explosant mon compte en banque, m’aide énormément.
Je pénètre enfin dans la boite de nuit. La chaleur est insoutenable et la musique agresse mes pauvres tympans, mais la bonne humeur ambiante m’envahit dès mon entrée. Un sourire sur les lèvres, je m’enfonçais dans cette foule dense et transpirante. Je me mis à danser, laissant mes problèmes s’évaporer peu à peu.
Tu crois peut-être que te trémousser parmi des gamines surexcitées t’aidera à la retrouver ? Sottises !
Je me stoppai net. Pas à cause de la voix, à laquelle il faudrait que je donne un nom d’ailleurs, mais bien à cause d’elle. Oui, elle était bien là, à quelques centimètres de moi seulement. Elle bougeait gracieusement, comme toujours, ne se souciant de rien. Un élan d’émotion me prit au ventre, j’en tremblerais presque.
Après avoir cherché sans trouver, il arrive que l’on trouve sans chercher…
Je m’aperçu d’un détail, plutôt important. Elle dansait, collée telle une moule à son rocher, à un homme. Qu’est ce qu’il faisait, accroché à mon Hermione ?! De quel droit il s’octroie la permission de la regarder ?! En moins d’une seconde, je me retrouvais devant son nez. J’étais plus grand que lui, ce qui n’était pas pour me déplaire. Il me regardait d’un air interrogatif. La musique était tellement forte que je du hurler pour qu’il m’entende.

« Dégage un peu, avant de finir à l’hopital !
- J’fais c’que j’veux, batard !
- C’est ma meuf, alors tu te barre avant que je m’énerve !»

Je le poussai dans le sens inverse d’Hermione. Mes yeux fous le dissuadèrent de revenir, et il partit sans demander son reste. Ciel, un tel langage n’est pas dans mes habitudes. Comme le disais si bien mon père, les petits bourgeois se doivent d’avoir un vocabulaire impeccable. Parfois, je me demande si je ne suis pas adopté, franchement. Je me retournais vers Hermy qui me regardait bizarrement.

« Hermione… »

Peu de chance qu’elle m’entende, vu les décibels qui fusaient dans tous les coins.
Sors d’ici alors, crétin.
Je me frappai encore une fois l’arrière du crâne. Je lui fis signe de me suivre hors de la salle.

« Faut que je te parle, c’est important ! »

J’avais hurlé cette fois, lui tendant la main. J’avais réellement envie de lui parler, qu’elle me pardonne mes erreurs…

Elle m’a pris la main… Oh Grand Dieux, elle m’a pris la main ! C’est le plus beau jour de ma vie. Je l’ai retrouvée, j’ai enfin rejoins ma raison de vivre. Des picotements dans la main, la boule au ventre, je l’emmenai dehors, sur le côté de la boite. Pas dans la rue évidement, hors de question de repayer l’entrée une deuxième fois. Elle lâcha ma main. La laissant retombée sur ma chemise à carreaux bleus blancs rouges, je sentis un grand froid. Un grand vide.

« Tu ne devrais pas être ici. Tu devrais être à Toulouse, avec ta famille et tes amis. Ces bourgeois. »

Oui, ces bourgeois… Ce monde puant l’argent auquel j’appartiens depuis ma naissance. Je les haïssais tous, mais comme toute personne côtoyant ce milieu, je me contentais de sourire bêtement et de rire jaune à chaque fois que je les voyais.

« Alors qu'est-ce que tu fais là ? Et c'était quoi cette mascarade à l'intérieur ?! Je ne suis pas ta meuf, je fais ma vie comme je le veux et avec qui je le veux. D'ailleurs, Ethen m'a beaucoup aidée à...»

Ethen ? Ah oui, j’avais presque réussi à l’oublier celui là. En surveillant chacun de ses mails, j’ai appris à connaître Ethen en même temps qu’elle. Pour moi, ce n’était qu’un homme horripilant qui n’avait fait qu’attirer Hermione loin de moi. Juste un enfoiré à cause duquel elle avait quitté mon pays. Bien qu’on ne soit plus dans la boite, j’hurlais sans vraiment le faire exprès.

« Ne me parle surtout pas Ethen ! Et t’as aidé à quoi au juste ?! Quitter tes origines ? Tes amis ?! »

Sa bouche s’ouvrit, mais aucun son n’en sortit. D’un coup, je me sentis mal.
Mais cesse de crier crétin ! Tu vas la faire fuir ! Tu auras fait des milliers de kilomètres pour tout foutre en l’air le premier soir !

« La ferme toi, je t’ai rien demandé ! »

Je me frappai l’arrière du crâne. Elle recula, l’air effrayée.

« Non… Hermy… Je… Je… Hm.. »

Je soupirai, las.
De plus, dois-je te rappeler que tu n’es pas sensé connaître Ethen ? Elle n’est pas au courant que tu connais sa vie mieux qu’elle-même !
Par tous les Saints, il avait raison… Le stress monta au niveau supérieur. Il ne fallait surtout pas qu’elle apprenne que je l’ai espionnée pendant deux ans, sinon ça gâcherait tout mes plans… Mes manche étaient retroussées jusqu’aux coudes, et comme à chaque fois que je stressais, je me griffais l’avant bras de ma main droite. Ces "toc" mon d’ailleurs causés bien des problèmes. Etant petit, je me faisais souvent grondé par Maria à cause de mes mutilations… La terrible douleur qui s’élançait dans ma chaire me fit sourire. Je ne sais pas pourquoi, mais plus mes ongles s’enfonçait, mieux je me sentais. Un petit rire sortit de mes lèvres. J’adorais ça.

« Nate... Qu'est-ce que tu fais ici ? Dis moi... »

Hm.. Cas de conscience. Comment lui expliquer ma présence ici sans énoncé le fait que je l'épie depuis plus de deux ans? Je choisis la facilité : esquiver la question. Me mutilant toujours le bras, je regardais ailleurs. Près de nous, se trouvaient deux personnes. Un couple s'embrassant à pleine bouche. Écoeurant...
Ne fais pas cette tête dégoûtée, je sais que tu as envie de faire pareil à Hermione.
C'est vrai. J'avais terriblement envie de l'embrasser...
Et t'attends quoi? Qu'elle parte encore dans un autre pays?
Non, pas maintenant, c'est trop tôt. Et pourtant... Mon regard se tourna vers elle. Elle me fixait, attendant une réponse. Cela faisait quelques minutes à présent qu'elle m'avait posé la question, et que je regardais ailleurs sans rien dire. Je ne comptais pas répondre de toute façon, alors autant qu'elle parle... Mes yeux descendirent vers mon bras. Ma main droite était couverte de sang, mon bras gauche également. Je ris malgré tout, sans trop savoir pourquoi. Je ne sentais pas ma force, et la douleur ne me faisait plus aucun effet à présent. L’endorphine une fois libérée, j’étais plus euphorique qu’autre chose. Une sensation que j’adorais plus que tout au monde.
Imbécile...
Hermione me regardait la bouche ouverte. Elle était tellement jolie... Je ne répondais plus de mes actes, mon corps étant à présent le seul dirigeant de mes prochaines actions. Je m'approchais d'elle, près, très près de son visage.

« Je ne t’ai jamais oubliée Hermione, je n'ai jamais cessé de t’aimer. Pardonne moi, je t'en prie… »

Elle bougea pas. Profitant de ce moment de flottement, je lui attrapais les hanches, collant mon corps au sien. Je lui baisai tendrement le front. J'aurais bien embrassé autre chose, mais je n'en avais pas le courage... Je savais qu'elle réagirait mal, et je n'avais pas envie de tout gâcher à cause d'une pulsion animale.
Judicieux mon grand. Mais te coller a elle n'était pas non plus la meilleure des solutions. Recule, avant qu'elle s'énerve.
Non. Je ne reculerai pas. Je n'avais pas envie de reculer. Son contact me fait frémir, fait battre mon coeur plus vite. Et cette sensation était en réalité bien meilleure que celle produit par le sang tachant à présent ses habits. Je souris, satisfait.

Le visage fermé, ses yeux bruns noisettes dans mes yeux émeraudes, elle s'éloigna, préférant couper notre contact. Je sentis comme un vide dans mon ventre, un froid, un manque. Je voulu la reprendre dans mes bras, mais me ravisai: elle n'avait visiblement pas envie d'être près de moi. Pourtant, malgré la légère peur visible dans ses yeux, elle ne partit pas. Pourquoi?
Ne te fais pas trop d'idées gamin, elle a peut être juste peur que tu ne la suive lorsqu'elle partira. Ce que tu feras, j'en suis sur. Tu as un regard de psychopathe, ne le nie pas. Ne la crois pas plus c*nne qu'elle ne l'est non plus...
La voix parlait, monologuait, s'excitait dans ma tête sans que je ne l'écoute. Hermione venait de faire un geste inattendu: un pas vers moi. Elle tamponnait un mouchoir blanc sur ma blessure, appuyant dessus pour arrêter l'hémorragie. Je sais qu'elle n'a jamais supporté la vue du sang, et que m’aider était réellement une preuve de courage, venant de sa part.
Je souris. Cela me rappela les nombreuses fois où, maladroit comme je suis, je m'étalais dans la cours de recréation et qu'elle me "soignait" en attendant l'infirmière. Un leur d'espoir illumina mes yeux, peut-être commençait-elle enfin a me pardonner?
Je te le répète, cesse de te faire des illusions. Elle ne t'as pas pardonné il y 2 ans, elle ne le fera pas maintenant.
Voici le principal passe-temps de la voix: me rabaisser et casser mes rêves. Pourquoi est ce que je combats encore ?

« Putain, Nathan, t'as vu ce que tu viens de te faire ?! Mais pourquoi tu te fais du mal comme ça, Nate, dis le moi ! Et arrête d'ignorer mes questions, je veux des réponses. Et je ne partirai pas sans les avoir eue... Et puis... »

Et puis..? Pourquoi ne finissait-elle pas sa phrase? Perdue dans ses pensées, elle tamponnait toujours mon bras d'un geste automatique. Après tout, si elle voulait des réponses, pourquoi ne pas lui en donner? Je n'irai nul part d'autre que dans le mur en continuant de l'ignorer.
C'est bien mon grand, un élan de lucidité !
Tiens, enfin un commentaire positif de sa part?

« Je ne me fais pas du mal, je ne sens rien. Il faut dire que j'ai connu bien plus grande douleur dans le passé... »

Mon langage soutenu de "p'tit bourgeois" comme le disait mon frère, était réapparu de lui même. Chassez le naturel et il revient au galop... La douleur a laquelle je faisais allusion n'était autre que celle qu'elle m’avait infligée en décidant de ne plus me parler. Je suis sur qu'elle saura décrypter ce message caché, comme elle a su si bien le faire durant toute notre adolescence. Dire que pendant des années, nous étions comme les 2 doigts de la main... Comment en sommes nous arrivés là..?

« Cela fait bien des années a pressent que nous ne nous sommes parlés, n'est ce pas? »

Je n'attendais pas réellement de réponse, c'était plus de la rhétorique qu'une vraie question. Mes yeux fixés sur mon bras, ou plutôt sur ses doigts se baladant sur celui ci depuis quelques minutes, je remontai mes yeux vers les siens. Je souris, usant de tout le charme dont je suis capable. Mon regard rencontra le sien... Mon ventre se serra.

« Un peu plus de deux ans et trois mois, oui. »

Un léger rire s’échappa de mes lèvres. Alors ainsi elle comptait même les mois ? Hé bien peut-être n’était-elle pas si indifférente à notre dispute. Une lueur d’espoir illumina mon visage.
Tu m’exaspères…

« Désolée si ce que j'ai dis ce jour-là t'as fait autant de mal, assez pour te faire changer à ce point-là. »

Ah !
Laisse la finir avant de me vomir un arc-en-ciel.
Elle s'est excusée ou je rêve? Les rôles s'inversent. Un instant assez jouissif, je dois l'avouer.

« Mais tu connais mes raisons. Et tu connais les raisons qui me poussent à ne pas te pardonner... »

Faux espoir.
Je te l'avais dit.
Que répondre a ça? Bien sur que je connaissais ses "raisons". Elle pensait que je l'avais trahie en la signalant aux services sociaux, or je n'ai fait que l'aidée. Elle était plus que malheureuse avec ses parents biologiques, je ne pouvais pas rester sans rien faire! J'ai donc fait ce qui m'a semblé le plus juste. Pourquoi suis je donc puni après avoir aidé mon prochain?
Un autre silence s'installa. Je cherchais ma réponse. Après quelques minutes, je dis enfin :

« Je dois t'avouer que je ne t ai jamais comprise. Je n'ai fait que t'aider. »

Cette phrase, je lui avais de nombreuses fois répétée. Je savais donc exactement ce qui allait se passer. Tout d'abord elle va essayer de rester calme, pour finalement éclater et hurler des mots incompréhensibles. Moi, je lui répéterai que je suis désolé, même si je ne le pense pas. Un scénario qui n’avait plus été reproduit depuis bien deux ans…
Elle avait retiré son bras au moment même où j’avais prononcé ma phrase. Le saignement avait diminué, mais je ne pu m’empêché de recommencer. J’attendais impatiemment sa réponse, m’enlevant, ou plutôt m’arrachant, le peu de peau qui persistait autour de la plaie/ Ma chemise était à présent rouge pourpre.
Je souris à Hermione.

« Non, Nathan... Tu as cru m'aider, ce n'est pas pareil. Bordel ! Je les aimais, Nathan ! Ils étaient mes parents. Qu'est-ce que tu en comprends pas la dedans ?! »

Ce que je ne comprenais pas ? Tout. Ou plutôt, je ne comprenais rien justement. Ils… Ils la battaient… La reniaient… Je ne comprends pas qu’on puisse faire du mal à un enfant, surtout Hermione. Je n’ai fait qu’aider un petit Ange noir malheureux… Sa voix s’était cassée, déchirée sur ses derniers mots. J’eus un pincement au cœur. Quand comprendra-t-elle compte qu’elle a besoin de moi ?
Sinon, tes chevilles vont bien mon grand ? Elle n’a en aucun cas besoin de toi, c’est plutôt toi qui ne peux pas te passer d’elle. Là est la nuance.
J’augmentais la vitesse de frictions sur mon bras, tentant de faire taire les calomnies qui se déversaient dans ma tête.
Elle me prit la main, imbibant sa manche de sang au passage. Je souris de ce contact, des papillons volant au creux de mon ventre. Est-ce la rareté du geste qui rendait cela si délicieux ?

« Arrête de t'infliger ça, s'il te plait... »

Me mutiler le bras m’apportait plus de satisfactions que de réelle douleur. Mais pourquoi enfin ?
Parce que tu es psychologiquement dérangé, imbécile.
Je serrais un peu plus la main d’Hermy, la regardant droit dans les yeux.

« Je… Je ne… Je ne peux pas. »

L’envie de continuer mon activité morbide était insoutenable. Je soupirai, tiraillé par un dilemme. J’entourai sa main des deux miennes.

« Hermy… J’ai vraiment envie que ça s’arrange entre nous. On… on était meilleurs amis enfin ! Comment en sommes nous arrivés là ? Ecoute ton cœur, fais appel à tes souvenirs, remémore toi comme nous étions proches… »

Je n’arrivais pas à prononcer mes mots correctement, ils avaient du mal à sortir. Pour ne pas dire quelque chose que je regretterai ensuite, je décidai de me taire, attendant sa réponse.